Déjà en 1975, Brian Eno était musicalement un outsider. Après sa période de claviériste chez Roxy Music, il est apparu que sa musicalité et sa créativité ne nécessitaient ni structure ni lois musicales. La musique ne doit pas nécessairement être faite avec des instruments de musique traditionnels. A l’époque, ses expérimentations aboutissent aux albums “Discreet Music” et le plus célèbre encore “Ambient 1 Music for Airports”. Un nouveau mouvement musical est né et nous l’avons appelé ‘ambient’.
Au fil des ans, l’esprit créatif de Brian Eno a été utilisé avec gratitude par de nombreux artistes qui ont collaboré avec lui, y compris les plus grands tels que David Bowie, U2 et Ultravox. Le nouvel album de Brian Eno, sorti récemment sous le titre “FOREVERANDEVERNOMORE”.
L’album compte 10 titres, et l’album parle de la «catastrophe climatique» qui affecte le monde. Eno est loin d’être optimiste quant à l’issue du cap actuel sur lequel nous naviguons tous. Bien sûr on sait qu’il ne faut pas s’attendre à un album de chansons d’Eno, mais “FOREVERANDEVERNOMORE” s’avère très heavy. Cela ne veut pas dire que ce n’est pas beau. Fermez les yeux et laissez-vous emporter sur les plus beaux paysages sonores, avec des sons de drones et de basses lourds qui donnent de belles voix légères éthérées, légèrement distordues juste ce qu’il faut de soutien. Sa fille Darla Eno chante. L’album est inconfortable, pénétrant, nihiliste, voire apocalyptique. Cela ne vous rendra pas heureux. Pas n’importe où.
Dès 2005, avec la sortie de “Another day on Earth”, Eno a exprimé sa profonde inquiétude quant à la façon dont l’humanité détruit son propre habitat. Maintenant, 17 ans plus tard, il est encore plus sombre. Alors qu’il y avait des structures de type sonate sur les albums précédents, jouées au piano, vous ne les rencontrerez pas sur cet album. La musique est sombre, basse, saturée de sustain, respirant comme le Xenomorph XX121 de la franchise ‘Alien’.
“FOREVERANDEVERNOMORE” est-il un bel album ? Il n’est pas facile de répondre à cette question. La beauté se cache parfois sous d’autres formes. À couper le souffle, c’est sûr. La musique fait réfléchir. En retenant votre souffle, les yeux fermés, plongez-vous dans l’eau du bain devenue froide en espérant que vous refaites surface. Eno a encore une fois été intransigeant. Nous devrions nous en réjouir. Bien que “FOREVERANDEVERNOMORE” ne se révélera pas être le catalyseur dont nous avons besoin pour inverser la tendance. Eno ne donne aucun coup de pied, ne fait pas de déclaration politique, mais fait quelque chose de beaucoup plus difficile. Il offre à ceux qui osent l’entendre un aperçu de son âme, introspectif et authentique. Une œuvre importante qui sera trop peu entendue. (8/10) (Verve/Universal)