Souad Massi joue plus que jamais du rock aux Pays-Bas

En se produisant à guichets fermés dans la salle ‘Hertz’ du centre musical TivoliVredenburg à Utrecht, l’auteur-compositeur-interprète algérienne Souad Massi a entamé une courte série de trois représentations aux Pays-Bas. Son dernier album, “Sequana”, est sorti à la mi-octobre de l’année dernière. L’album, qui a été largement salué par la critique et a été l’un des trois albums nominés pour le titre de ” meilleur album de musique du monde ” aux Victoires du Jazz de Francetv, n’avait pas encore fait l’objet d’une promotion en direct aux Pays-Bas, et la salle était donc remplie de fans qui attendaient cette représentation avec impatience. Des gens de la diaspora algérienne, qui avaient pris place avec enthousiasme dans le public avec le drapeau algérien, mais aussi un bon nombre de personnes pour qui cette soirée serait une première introduction à la musique de Souad Massi.

Après un petit ‘Maghrebine’ fantaisiste, quinze minutes plus tard que prévu, les lumières de la salle s’éteignent, le groupe de quatre musiciens de Souad Massi entre en scène, suivi quelques instants plus tard par la chanteuse elle-même, vêtue d’un noir morose et élégant.

Le guitariste, qui joue plus qu’excellemment, entame une longue intro sur le premier album, ” Dessine moi un Pays “, et l’on attend le déploiement de la voix de Massi, qui rachète tant de promesses sur l’album. En direct, à Utrecht, c’est ce que la chanteuse a fait. Sa voix va droit au cœur. Souad Massi est une chanteuse qui, même si l’auditeur ne parle pas couramment la langue arabe, parvient tout de même à se frayer un chemin jusqu’à la tête et au cœur de l’auditeur. Les émotions comme l’amour, le mal du pays et la réflexion sont universelles et Souad sait toucher le ton du cœur comme personne. La chair de poule.

 

Une Seule Étoile’ a suivi. Cette chanson est la quintessence de l’album ‘Sequana’. Massi sort de ses sentiers battus et intègre ici aussi des rythmes latins et de la musique maure dans son vocabulaire musical. Un début de concert très fort. La setlist de ce soir mettait l’accent sur l’album le plus récent, mais Souad a également offert au public, par exemple, ‘Oumniya’ de son album précédent, un chef-d’œuvre de l’artisanat de l’auteur-compositeur-interprète dans une version feutrée et magnifiquement arrangée.

Au fur et à mesure de la représentation, le groupe a commencé à jouer plus librement et il était clair que Souad lâchait un peu plus les rênes. La joie de jouer était évidente sur scène. Peut-être était-ce dû au fait que le public néerlandais n’était pas familier avec ce morceau, mais le public ne s’est pas encore vraiment détendu. Bien sûr, Souad a reçu ses applaudissements bien mérités après chaque chanson, mais l’étincelle n’a vraiment sauté qu’un peu plus tard dans le spectacle. Lorsque le groupe s’est lancé dans sa version de “Hurt” de Johnny Cash, une vague de reconnaissance a traversé la salle, et c’était comme un signe pour le groupe de passer à la vitesse supérieure. La joie de jouer est grande et il est clair qu’il y a de plus en plus d’improvisation sur scène, ce qui se traduit par une plus grande dynamique et un plus grand dynamisme. Souad Massi parvient à ajouter une nouvelle dimension aux performances qu’elle connaît si bien. C’est ce que ferait aussi un groupe de rock. Cela convient parfaitement à Souad.

‘Twam’ n’est bien sûr à la base qu’une chanson rock, et elle a été amenée avec verve. On peut se demander à quoi ressemblerait Souad Massi si elle l’interprétait avec un groupe de rock traditionnel. Elle a commencé par être la chanteuse du groupe de rock Akator, et il est clair qu’au fond d’elle-même, elle est toujours une rockeuse.

Cependant, elle a encore le temps de faire une rétrospective lorsqu’elle interprète la superbe chanson “Victor”, dédiée à Victor Jara, l’activiste, poète, auteur-compositeur-interprète et communiste chilien, assassiné par la junte de Pinochet dans les années 1970, alors que Souad Massi n’était encore qu’un bambin. La façon dont Souad Massi laisse vivre le nom de cet homme et présente au public ses inspirations musicales est merveilleuse.

Souad et son groupe ont reçu une ovation debout, avec ici et là un drapeau algérien, et le public d’Utrecht en a redemandé, ce qu’il a obtenu. Souad Massi est revenue une fois de plus. Selon beaucoup, le spectacle était trop court, ce qui est bon signe lorsque les gens n’en ont jamais assez d’un artiste. Le public d’Utrecht a vu une Souad Massi qui a interprété son matériel de manière plus libre et qui s’est laissée bercer par un plaisir visible à jouer plutôt qu’à colorier ses propres lignes. Une aventure qui mérite d’être poursuivie.

Photos par : Eric van Nieuwland