L’aperçu des nouveaux albums : War, Danny Zeitlin et plus

Chaque semaine, des dizaines de nouveaux albums arrivent à la rédaction de Maxazine. Bien trop nombreux pour tous les écouter, et encore moins pour les critiquer. Une critique par jour fait que trop d’albums restent sur l’étagère. Et c’est dommage. C’est pourquoi nous publions aujourd’hui un aperçu des albums qui arrivent à la rédaction sous forme de critiques courtes.

WAR – Why Can’t We Be Friends ’50th Anniversary Collector’s Edition’ – Coffret 3CD

WAR a sorti en 1975 un album qui peut être considéré comme une redéfinition du genre jazz-rock : ‘Why Can’t We Be Friends’, même si beaucoup l’ont acheté pour l’illustration de la pochette. Emballé dans un mélange de funk, soul et latin, le groupe a livré un message clair et sans équivoque qui condamnait fermement l’absurde inégalité entre les êtres humains. L’album n’a pas perdu un millimètre de pertinence en 50 ans, bien au contraire. Les fans ont dû être agréablement surpris par l’édition spéciale Record Store Day de ce monument : sur trois LP, vous n’obteniez pas seulement l’album original, mais aussi une montagne de matériel bonus. Malheureusement, avec un prix de plus de cent euros, c’était surtout destiné aux collectionneurs de vinyles plus fortunés. Quelqu’un parlait-il d’inégalité ? Heureusement, Rhino a maintenant mis tout ce matériel sur 3 CD. Pour cela, vous devez laisser quarante euros chez votre disquaire. Ça en vaut la peine. L’énergie jaillissait déjà de l’album tel qu’il est sorti en ’75, mais les versions pures et premières de ‘Low Rider’ et ‘So’, plus la session de jam qui a mené à ‘Heartbeat’, constituent en tout le superlatif. C’est ainsi que ces morceaux auraient dû être. (Jeroen Mulder)(8/10)(Rhino)

Chaka Chawasarira – Useza

À une époque où la musique traditionnelle du Zimbabwe risque de disparaître à cause des condamnations évangéliques, Sekuru Chaka Chawasarira prouve avec ‘Useza’ que la musique matepe zimbabwéenne authentique peut encore toucher directement le cœur. Le maître de 82 ans du piano à pouces est l’un des derniers virtuoses restants de cet instrument complexe, qui se joue avec les pouces et les index pour créer des polyrythmes hypnotisants. L’album a été enregistré dans le silence mortel de la nuit à Chitungwiza, Chawasarira travaillant seul pour recréer les sons envoûtants d’un rituel Shona en superposant des séquences fractales discrètes pleines d’harmoniques fantomatiques et de rythmes bourdonnants. Le résultat est merveilleusement kaléidoscopique – une musique que l’on peut écouter sous différents angles et qui révèle toujours de nouvelles couches. Chawasarira, né en 1941 et élevé comme orphelin dans une mission catholique, a consacré toute sa vie à préserver cette forme d’art presque éteinte. Là où il y a cinquante ans, six musiciens ou plus jouaient ensemble dans les cérémonies des peuples Sena Tonga et Kore-Kore, il reste maintenant moins de dix maîtres. Ses overdubs sur des morceaux comme ‘Hurombo’ et ‘Kuvachenjedza’ montrent ce qu’une personne peut accomplir avec un pur dévouement. Il est magnifique que Nyege Nyege Tapes, le label basé à Kampala qui se consacre à l’exploration de la musique marginale de la région, fasse de la place à ces sons ancestraux aux côtés de leurs sorties électroniques habituelles. Cette documentation authentique du patrimoine du Zimbabwe mérite tout le respect et l’attention dans un monde qui oublie trop vite où sont ses racines. (Jan Vranken)(7/10)(Nyege Nyege Tapes)

Jayer Slayer – Identity Crisis 2

Le musicien suisse solitaire Jayer Slayer présente avec ‘Identity Crisis 2’ un EP éclectique qui cherche délibérément les limites entre ambition musicale sérieuse et expérimentation ludique. C’est la première incursion de Jayen dans le format EP, dans lequel il se montre comme un artiste à l’aise dans l’esthétique lo-fi des enregistrements domestiques. Les trois morceaux évoluent entre les tournants progressifs à la Zappa et l’énergie plus rugueuse de Primus. ‘Rock ‘n Roll Insect’ s’ouvre avec une originalité caractéristique, avec une ligne de basse qui sonne immédiatement familière. ‘Fucking Wired’ augmente l’intensité avec une approche directe et brute. Le point culminant est sans aucun doute ‘Feverdream’, un morceau habilement composé qui contient plusieurs changements de tempo subtils et révèle une riche couche instrumentale qui transcende le caractère lo-fi. L’attitude paradoxale de Jayer Slayer, qui est à la fois sérieuse et à ne pas prendre au sérieux, fonctionne étonnamment bien. L’EP ressemble à la fois à une déclaration musicale vécue et à un exercice de doigté ludique. Pour les amateurs de rock expérimental avec une touche d’absurdisme, c’est une découverte prometteuse. (7/10) (Production indépendante)

Denny Zeitlin – With a Song in My Heart

Richard Charles Rodgers : un nom indissociablement lié à Broadway, avec une production improbable : l’homme a écrit environ quinze cents chansons dans 37 comédies musicales. Le pianiste de jazz Denny Zeitlin a dû ressentir le stress du choix en sélectionnant les chansons qu’il présente sur ce ‘With a Song in My Heart’. Le choix suivant que vous devez faire en tant que musicien interprète est : est-ce que je m’en tiens à l’original ou est-ce que j’y apporte quelque chose de spécial ? Zeitlin est assez aguerri et expérimenté pour donner sa propre interprétation aux onze classiques. Vous l’entendez directement dans l’ouverture, ‘Falling In Love With Love’. La mélodie originale est certainement reconnaissable, mais Zeitlin y ajoute un nouveau rythme et quelques modulations tonales surprenantes. Ce jeu avec les rythmes est quelque chose que Zeitlin répète souvent : ainsi ‘I Didn’t Know What Time It Was’ reçoit effectivement un temps différent, en le jouant en 7/4. Le pianiste lui-même a maintenant atteint l’âge plus que respectable de 87 ans, mais on n’en entend absolument rien sur cet album. Zeitlin joue avec une passion dont maint collègue plus jeune peut prendre exemple. Un hommage digne d’une légende de Broadway. (Jeroen Mulder)(8/10)(Sunnyside Communications)

Various Artists – Music for Jazz Dancers

Cette compilation du DJ Adrian Gibson est un parfait instantané de la scène jazz-dance britannique qui a provoqué des ondes de choc dans le monde entier. Gibson, connu pour son légendaire club ‘Messin’ Around’ au Jazz Café, a rassemblé ici une collection qui vient directement de ses sets – et ça s’entend. L’album s’ouvre en fanfare avec l’interprétation foudroyante de Peter Herbolzheimer du standard jazz de Ray Noble ‘Cherokee’ avec Dianne Reeves, qui avec sa voix soyeuse donne immédiatement le ton. Ce n’est pas du jazz lounge paresseux, mais du carburant pour piste de danse de la plus haute qualité. ‘Kon Djab Djigidi’ de Mario Canonge fait entendre ce dont la fusion est vraiment capable – avec des influences latino et un solo de basse à faire fondre. ‘Samba Torto’ de Marcos Ariel est de la Samba-Fusion brésilienne du plus haut niveau – huit minutes d’extase pure pour les jambes. Le Hi-Fly Orchestra apporte une dose d’adrénaline avec leur ‘Hi-Fly Stomp’ entraînant, tandis que The Brian Lynch & Eddie Palmieri Project prouve que le Latin-jazz et les grooves de danse modernes vont de pair.

Ce qui rend cette compilation si forte, c’est le fil conducteur : tout est sélectionné du point de vue de ce qui fonctionne vraiment sur la piste de danse. Gibson a pris un plaisir absolu à compiler ce joyau de piste de danse, et cette passion rayonne de chaque morceau. Du bebop au nu-jazz, du big band à la samba-fusion – c’est le jazz comme il doit sonner : vivant, transpirant et irrésistiblement swinguant. Un petit défaut : parfois la sélection semble un peu aléatoire, comme s’il aurait pu y avoir plus de focus sur un son plus cohérent. Mais pour les amateurs de jazz dansant, c’est un incontournable qui montre pourquoi la scène jazz-dance britannique est devenue si influente. (Jan Vranken)(7/10)(Freestyle)