Chaque semaine, des dizaines de nouveaux albums arrivent à la rédaction de Maxazine. Beaucoup trop pour tous les écouter, et encore moins pour les critiquer. Une critique par jour fait qu’il reste trop d’albums en suspens. Et c’est dommage. C’est pourquoi nous publions aujourd’hui un aperçu des albums qui arrivent à la rédaction sous forme de critiques courtes.
Aedan Sky – The Universal Realm
Le multi-instrumentiste Sébastien Chabot est guitariste et chanteur du groupe de power metal français Galderia et bassiste/compositeur chez Kingcrown. Son tout nouveau projet solo s’appelle Aedan Sky. L’album de début ‘The Universal Realm’ contient du power metal mélodieux. Cet opéra metal raconte un voyage cosmique vers l’éveil spirituel et la conscience universelle. L’ouverture instrumentale est calme, puis le metal s’ajoute. Ceci est alterné avec quelques parties plus calmes/éléments classiques. Le contraste de volume entre eux est assez faible. Tant instrumentalement que vocalement, le tempo est parfois extrêmement élevé. Trois chanteurs principaux interprètent les rôles des personnages principaux : Sky, Aedan et Sky’s Soul. Leurs voix diffèrent, mais il faut parfois “chercher” pour savoir qui chante quoi. Quand le chant se chevauche, il n’est pas facile de tout comprendre. Mais les voix forment un excellent mélange. Pour un opéra metal, le son n’est pas assez plein/riche. À part cela, il y a surtout des points positifs, notamment pour le jeu de guitare. L’atmosphère sur ‘The Universal Realm’ correspond au texte et à la musique entraînante. (7/10) (Rockshots Records)
Shawn Purcell – Oblivity
Il y a le jazz et il y a le jazz hardcore : le hard-bop. Et c’est la première chose que vous obtenez quand vous lancez ‘Oblivity’ du guitariste Shawn Purcell. Le tempo est directement élevé dans le morceau-titre qui est aussi l’ouverture, avec des improvisations captivantes d’abord du saxophone et du piano, avant que Purcell lui-même ne laisse ses doigts virtuoses glisser à toute vitesse sur les cordes. Ce saxophone est d’ailleurs joué par Walt Weiskopf, un secret bien gardé dans le jazz avec cependant un solide état de service chez notamment Sinatra et Buddy Rich. Purcell réussit à capturer un beau mélange de divers styles bop dans ses propres compositions. Metheny, Coltrane, Silver et Shorter : les influences sont clairement reconnaissables. Cela donne un disque varié avec des éléments surprenants qui vous prennent parfois au dépourvu. Le morceau de dix minutes ‘Verdigris’ s’ouvre par exemple avec un chant de sirène avant de passer à un groove latin entraînant. Dans celui-ci, Purcell laisse une fois de plus beaucoup de place au travail au piano de Chris Ziemba et au saxophone de Weiskopf. Un point de repos est ‘Gentle Giant’ avec un travail de guitare très subtil, clean soft-tone et un impressionnant solo de basse acoustique de Jeff Reed. Mais ce sont tout de même les morceaux up-tempo qui donnent son caractère à ce disque, avec comme point culminant ‘Move the Needle’ : du hard-bop dans la meilleure tradition de ce genre, où Purcell n’hésite pas à faire sonner sa guitarre de manière surprenamment différente : dans ce morceau dotée d’un véritable solo shred avec overdrive et même un octave divider comme effet ajouté. Naturellement, le jeu de guitare est au premier plan, mais Purcell prouve avec ‘Oblivity’ être également un compositeur doué avec des morceaux dynamiques où le bop traditionnel et le jazz moderne s’articulent parfaitement. (Jeroen Mulder)(7/10)(Origin Records)
The Imaginaries – Fever
Cela arrive souvent dans le monde de la musique, un couple marié qui forme un groupe de musique. Cependant, on ne voit pas souvent que l’album de début d’un tel groupe ou d’un artiste musical en général soit un album de Noël. Tant le premier que le dernier cas s’applique au groupe folk/country rock américain The Imaginaries. Récemment, ils ont sorti leur troisième album, le deuxième qui n’est pas dans un thème de Noël ou d’autres fêtes. De plus, plusieurs artistes invités participent ici qui ne sont certainement pas les moindres noms. Avec le virtuose de la guitare Joe Bonamassa, ils interprètent ‘Crossroads’, qui est aussi leur morceau le plus streamé. La légende country et plus de 20 fois gagnant des Grammy Vince Gill joue également un morceau. ‘Whole Lotta Livin” est donc dans ce style et également un vrai ver d’oreille, une chanson feelgood. De plus, cet album se compose de beaux chœurs et de bonnes chansons pour former avec les deux morceaux mis en évidence un album agréable. (7/10) (The Imaginaries Music ltd.)
Peter Campbell – Haunted Melody
Jacques Brel ? Vraiment ? Absolument : ‘Song for Old Lovers’ est une adaptation de ‘La Chanson Des Vieux Amants’ de Brel. Votre critique est un fan de Brel et toujours un peu méfiant quand quelqu’un reprend Grand Jacques, mais la version du chanteur et producteur canadien Peter Campbell est magnifique. Ce n’est pas la seule reprise sur ‘Haunted Melody’ : Campbell a également adapté ‘No One After You’ de Leonard Cohen et ‘He Never Mentioned Love’ de Curtis Lewis. Le choix de grandeurs comme Cohen et Brel révèle que Campbell est avant tout un conteur d’histoires : les chansons doivent parler de quelque chose, avoir de la profondeur. Un conteur d’histoires avec une voix délicieuse, car il faut le dire : le Canadien est doté d’une voix qu’on peut écouter pendant des heures. Le choix du répertoire sur ‘Haunted Melody’ révèle aussi autre chose, car on voit et entend immédiatement que ces morceaux sont une réflexion de quelqu’un qui s’est senti seul. C’est exact. Campbell a traversé une période de deuil : outre un divorce, le Canadien a aussi eu à traiter fin 2024 la perte de ses deux parents. Cette élaboration, il la fait sur ‘Haunted Melody’. De beaux morceaux portés avec des arrangements dans le style de Bacharach (écoutez surtout le morceau final ‘If Ever (Saudade De Amar)’, dans lequel Campbell est accompagné par une sélection de musiciens de premier plan. N’attendez pas d’extravagances, mais installez-vous dans un fauteuil confortable et laissez ‘Haunted Melody’ vous envahir. Délicieux. (Jeroen Mulder)(7/10)(Peter Campbell)
Cécile McLorin Salvant – Oh Snap
Avec ses albums précédents ‘Ghost Song’ et ‘Mélusine’, MacArthur Fellow Cécile McLorin Salvant a prouvé qu’elle appartient aux plus grandes chanteuses de jazz de notre époque. Sur ‘Oh Snap’, la triple gagnante des Grammy se risque cependant à une expérience radicale qui surprendra son public traditionnel. Ces treize mini-chansons sont nées dans son studio à domicile, où Salvant a expérimenté pour la première fois avec GarageBand, AutoTune et des plugins MIDI. Le résultat ressemble à un journal de bord intime dans lequel ses souvenirs de jeunesse de la scène musicale de Miami des années quatre-vingt-dix sont centraux. Du morceau-titre hypnotisant, qui rappelle la période ‘Ray of Light’ de Madonna, à la reprise ludique de ‘Brick House’ des Commodores, Salvant montre sa polyvalence. Le point culminant absolu est ‘Expanse’, où son élégance jazz classique se mélange avec des techniques de production modernes. Malheureusement, l’album dans son ensemble manque de la cohésion de ses chefs-d’œuvre précédents. Des morceaux comme ‘A Little Bit More’ avec de lourds effets autotune ressemblent plus à des hits disco qu’à des déclarations artistiques vécues. ‘Oh Snap’ est une recherche artistique courageuse de spontanéité et de joie, et par conséquent l’amateur de jazz inconditionnel peut être rebuté, mais si vous vous lâchez et vous laissez porter, c’est un album formidable. (Jan Vranken) (8/10) (Nonesuch Records)