Ce n’était pas si loin que ça quand on y pense. La plus grande rock star des Belges, Arno Hintjens, est décédée le 23 avril dernier. Le vendredi 30 septembre prochain, l’album “Opex” sortira à titre posthume sur le label Pias.
Le nom “Opex” vient du quartier d’Ostende. ‘ Le Vuurtorenwijk en bon flamand est un quartier un peu triste avec une économie de la pêche et de la mer de plus en plus en déclin. Cette “tristesse” s’est inscrite dans les gènes du défunt chansonnier et se retrouve, rétrospectivement, dans toute son œuvre, de ses premiers pas avec Tjens Couter à son magistral “Santeboutique” de 2019, alors qu’il se savait déjà malade.
Donc, maintenant “Opex”.
L’album a été enregistré étape par étape, sur une période d’un an. Au printemps 2021, Arno et le bassiste/producteur Mirko Banovic ont enregistré quatre chansons dans son home studio à Gent. Ces enregistrements de voix ont été conservés, la musique a été retravaillée à l’automne au studio ICP à Bruxelles, où les autres chansons ont été réalisées et terminées au printemps 2022. Opex est un album de famille. Grand-père” met en scène Charles Hintjens, le grand-père d’Arno qui, à l’époque, l’emmenait dans des bals populaires et lui montrait comment séduire les femmes. I can’t dance” recrée l’une des meilleures chansons de Tjens Couter, le duo avec Paul Couter avec lequel il a tourné pendant des années. La vérité” est construite sur un rythme de Felix Hintjens, le plus jeune des deux fils d’Arno, qui fait également de la musique. Sur “I’m gonna whistle”, Peter, le frère d’Arno, joue du saxophone.
L’album comporte 10 titres et sa production est de premier ordre. Musicalement, l’album baigne dans une sorte de désespoir croissant. Marécageux, puis à nouveau comme un bras tendu vers le haut du marécage dans une sorte de jubilation fabriquée, nous entendons Arno commencer lentement à chanter moins bien. Le timbre devient fragile, l’intention se dresse fièrement. C’est la tristesse que nous connaissons si bien et que nous pouvons considérer comme “typique” d’Arno. Sur “Opex”, cependant, ce n’est plus une blague. Arno n’est plus. C’est là que se trouve son cœur et son âme. Un testament musical.
Le premier extrait, “La Verite”, est déjà sorti en single. La vérité se trouve dans ce qu’il chante aujourd’hui. Rétrospectivement, presque tout s’alourdit, mais il est clair qu’Arno a déjà travaillé à sa perte ici. Réaliser un dernier album avec ses proches. Cela pourrait-il être plus significatif ?
Je pense que je peux imaginer qu’Arno a apprécié l’idée d’enregistrer “Paloma” en duo avec nulle autre que Mireille Mathieu.Malheureusement, la chansonnière française qui a ruiné la jeunesse tent des gens de la génération X avec son doux croonage n’a jamais pu être en studio avec Arno. Elle l’a doublé. Non, alors la version qu’Arno a enregistrée avec Charles est les Lulus est préférable.
Take me Back”, quant à lui, s’intègre parfaitement dans l’idiome de “Santeboutique”. En errant sur la plage d’Ostende, fouettée par les grains de sable d’un fort vent de nord-ouest, je vois devant moi Arno qui cherche une fois de plus le pardon d’une femme. Merveilleux.
Sur ‘Boulettes’, nous retrouvons le typique Arno tel que nous l’avons connu avec ‘Putain Putain’. “Ne me dites pas ce que je dois faire”, chante-t-il. Il célèbre la vie de manière anarchique, en allant à contre-courant s’il le faut. Arno devient lentement plus grand que l’ombre qu’il laisse derrière lui.
Sur “Court Circuit Dans mon Esprit”, la collaboration avec le pianiste Sofiane Pamart est renouvelée, et l’atmosphère magique et inquiétante de l’album “Vivre” renaît immédiatement, mais de manière encore plus intense. Chair de poule
Opex” est le dernier adieu au plus grand chanteur de rock qui n’a peut-être jamais, mais en tout cas seulement trop tard, commencé à donner à la Belgique la reconnaissance qu’il a toujours méritée.
Une fois de plus, Arno a donné tout ce qu’il ne lui restait peut-être plus. C’est un adieu magistral. Vous resterez certainement triste après avoir écouté cet album. Pour l’instant, j’écoute avec plus de facilité des albums comme ” Santeboutique ” ou ” Vivre “. Les “Opex” arrivent peut-être trop tôt. L’année prochaine, peut-être. Je peux mieux en profiter alors. (8/10) (Pias)