Angelo Branduardi formidable au Cirque National de Bruxelles

Photo (c) Stéphane Risack

Angelo Branduardi, le barde italien, a récemment enchanté le public avec son spectacle éthéré au Cirque Royal de Bruxelles le 18 avril 2023. La salle était bondée de mélomanes et de fans qui attendaient avec impatience la prestation magique de Branduardi. L’homme ne se produit pas très souvent dans les Pays-Bas, alors quand il le fait, en tant que fan, vous devez être là.

Le Cirque Royal de Bruxelles pourrait bien avoir été conçu spécialement pour un spectacle de Branduardi. Le bâtiment a été construit en 1878 comme théâtre de cirque permanent, mais avec les dernières rénovations qui ont préservé le style et l’atmosphère d’une époque révolue, le théâtre offre la meilleure scène pour la musique de Branduardi. Le concert s’est avéré être une vitrine du style musical unique de Branduardi, mélangeant la musique folklorique italienne traditionnelle, les contes médiévaux, avec des éléments classiques et contemporains. Le Cirque Royal était le lieu idéal pour cette représentation, avec sa magnifique acoustique et son décor élégant qui ont créé une atmosphère intime et enchanteresse. Lorsque les lumières se sont éteintes, le public a été transporté dans un autre monde lorsque Branduardi est entré en scène, accompagné d’un groupe de musiciens talentueux.

Branduardi, aujourd’hui âgé de 73 ans, se tenait complètement seul devant le rideau, avant le début de la représentation. Il voulait expliquer le programme. Il était là. Plus âgé, certes, mais toujours avec son impressionnante chevelure et son inséparable violon. Petit, mais doté d’un charisme et d’une personnalité qui, sans faire d’histoires, parviendraient à toucher aisément toutes les personnes présentes dans la salle.

La première partie du spectacle comprendra la suite “Il cammimo del’ Anima”, inspirée, nous dit Branduardi, par la vie de la mère supérieure bénédictine Hildegard von Bingen, et basée sur son Ordo Virtutum, “Ordre des vertus”, un drame chanté pour voix de femmes avec une partie pour voix d’homme (le diable), le tout interprété ce soir par Branduardi et les membres de son groupe.

Dès la première note, il était clair que nous allions vivre une expérience inoubliable. L’interprétation de cette suite a duré un peu moins de trois quarts d’heure et a montré que Branduardi, malgré son âge avancé, est toujours un musicien qui crée et ne se contente pas de reproduire. La suite avait été une très belle leçon pour des groupes de métal comme Nightwish ou d’autres qui pêchent souvent dans la même mare sur le plan thématique. Branduardi a fait quelque chose d’autre pour eux en matière de composition et d’interprétation.

La suite, interprétée à la perfection, a été accueillie par un tonnerre d’applaudissements. Ce que le public ne savait pas, c’est que Branduardi venait à peine de commencer. Avant même une courte pause, Branduardi et son groupe se sont redressés et ont pris une grande inspiration. Dans l’obscurité, il a levé son archet et, avec son violon, il a interprété l’un de ses plus grands succès, “Si piu Fare”. La chaleur de sa voix et l’interaction unique des voix n’ont pratiquement pas souffert. La chair de poule est immédiate. Fabio Valderin, longtemps claviériste de Branduardi, a réussi à mettre en place les parties orchestrales et l’arrangement des cordes de manière très convaincante, et en Antonello d’Urso Branduardi a un guitariste qui joue les belles parties à la guitare acoustique et électrique exactement comme le public les connaît.

Gulliver’ est devenu le point culminant de cette représentation. Une mise en œuvre parfaite qui a fait se lever le public. Les Néerlandais, les Belges et les Allemands reconnaîtront le thème de ‘7 days long’ de Bots, mais l’histoire de cette musique remonte à 1928. Il s’agit d’une composition d’une chanson de mariage par deux adolescents bretons. Quoi qu’il en soit, la version de Branduardi n’en est pas moins impressionnante. Avec ‘La serei di Numeri’, Branduardi et son groupe ont joué en gradation jusqu’à la pause. Le public n’a pas eu besoin de pause et s’est levé comme un seul homme pour applaudir à tout rompre le maestro, comme s’il s’agissait de Caruso à la Scala de Milan. Branduardi a beaucoup donné, beaucoup donné, et le public l’a senti et lui en a été reconnaissant.

Après une courte pause, l’heure suivante a été très dense et pleine de pure magie. Branduardi a fait sentir au public qu’il était là pour lui, qu’il lui apportait sa musique. Non pas pour s’honorer en tant que ‘star’. Non, Branduardi a rassemblé le public autour de lui et nous a fait passer une soirée inoubliable. Il y avait un diamant sur la scène.

Dans la deuxième partie du concert également, Branduardi nous a emmenés dans son univers musical avec des récits basés sur la vie de François d’Assise, sur le sultan de Babylone et la prostituée, mais aussi avec des favoris du public comme “La Luna” et “Il done del Cervo”, toutes des musiques que le public porte en lui depuis des décennies comme des repères musicaux dans sa vie. Branduardi les a fait revivre, touchant les gens, y compris votre chroniqueur, au plus profond de leur cœur. La chair de poule et, à l’occasion, une larme gonflée au coin de l’œil. Le pouvoir de la musique, l’authenticité de Branduardi, la magie de son violon. Le petit homme à la grosse tignasse. Tout le monde l’a ressenti au Cirque Royal. Personne n’y échappe.

Alla fiera del ‘est’ a été chanté en cœur en français et en italien, mais pas avant que Branduardi ne l’ait chanté a cappella en ukrainien, en guise de déclaration pour la paix. Avec “La Pulce D’aqua” et “Vanita di Vanita”, Branduardi et le grand orchestre ont porté la soirée à son apogée. Tout le monde dansait et applaudissait, tandis que nous nous laissions envahir par la musique comme une vague chaude. Ici, les gens ont ressenti la magie de la musique. On peut espérer que tout le monde, même si ce n’est qu’une fois dans sa vie, aura l’occasion de vivre un tel concert.

Le public s’est levé et Angelo Branduardi a été ovationné pendant de longues minutes. Il avait le sourire aux lèvres. Il était clair que l’énergie que lui et ses musiciens avaient envoyée dans la salle avait été ressentie sur scène. Branduardi m’a rendu heureux, et avec moi beaucoup, beaucoup d’autres, ce soir-là. De la magie à l’état pur.